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2006 Au milieu du désordre / 2006 La Chaussée Hérisson

Mis en ligne le mercredi 10 juin 2009, par Jean-Pierre Estournet

12 documents

Texte, mise en scène et jeu : Pierre MEUNIER

Au milieu d’un cercle de gens, un homme prend tout son temps pour entasser des pierres. II pose la dernière, recule lentement sans quitter le tas des yeux. Dans l’assistance on chuchote, on soupire d’impatience, on pouffe, on espère une suite, on est quand même pas venu pour ces pauvres cailloux !… Inattendu et dense, le silence se fait. L’homme l’a fait naître. Face au tas, il l’observe, le corps traversé de mouvements, de questions ou de rougeurs qui semblent lui échapper.C’est le présent. Moment d’attraction pure.Tantôt grave, tantôt léger, un dialogue s’établit entre l’homme et la matière. Soudain au milieu d’une phrase, l’homme se met à bondir, à sauter de plus en plus haut, narguant la pesanteur de toute sa hauteur et vantant hors d’haleine les mérites du rebond. Le ressort l’inspire, avec sa manière têtue de résister à la chute. Si le bonheur d’après Kafka est d’oublier que l’on tombe, la jubilation de l’homme qui rebondit sous nos yeux nous convainc du contraire. La danse des ressorts, auxquels il suspend des pierres, le captive. Véritable musique pour l’œil, ce système pulsatoire asynchrone et spiralé stupéfie l’assistance par sa grâce énigmatique. En un doux va-et-vient, nous assistons à la réconciliation entre le haut et le bas. Oubliant le début, nous ne croyons plus à la fin tandis que l’immobile approche.Compagnon de légèreté aux spires d’acier bleu, pourquoi est-il si bref le temps de l’insouciance ?…Longtemps après tintera en nos oreilles la pureté carbonée du concerto de Schmirnov pour ressorts suspendus, que l’homme interprète au marteau de carrossier en guise de salut. Rêveur actif, Pierre Meunier tente d’entraîner le public sur le chemin qui mène au cœur caché des choses. Trimballant par monts et par vaux ses seaux de cailloux et sa malle de ressorts, il s’estimerait heureux s’il pouvait le temps d’une soirée réveiller la soif de cet élan dont le manque, organisé par notre propre indifférence, nous prive d’établir une relation intime et poétique avec le monde.

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